En présence de diverses personnalités et représentant-e-s d’institutions nationales et internationales, dont le Ministère à la condition féminine et aux droits de la femme (MCFDF) et les autorités locales des différentes communes frontalières, le Groupe d’appui aux réfugiés et rapatriés(GARR) a commémoré la journée internationale des Droits des femmes le 8 mars 2018 à Ganthier, Belladère et Ouanaminthe , entre autres, sous le thème « Ann bay jarèt ak patisipasyon fanm yo nan zafè peyi yo ». En cette occasion, se sont réalisées des conférences-débats, des ateliers de réflexion, des pièces théâtrales et marches pacifiques ainsi qu’une messe d’action de grâce.
Sous fond de profondes réflexions et revendications, des centaines de femmes d’organisations féministes au T-Shirt, banderoles et pancartes de circonstance, pour la plupart membres des plateformes genre des communes frontalières montées dans le cadre du projet Fwontyè San fòs kote financé par l’Union européenne, ont participé activement aux activités commémoratives du 8 mars 2018 les communes frontalières précitées.
Intervenant à titre de conférencière à Balan, une section communale de Ganthier, la responsable du dossier Genre au bureau du GARR, Louna François, a mis l’accent sur la participation active des femmes aux activités socio-économiques du pays.
Définissant le concept de participation comme un droit fondamental d’implication que jouit une personne au sein d’une communauté ou d’une société, Louna François a tenu à passer au crible les concepts opportunité, capacité et motivation comme les principaux facteurs déterminants pour la participation des femmes avec des exemples à l’appui.
Selon elle, la participation ne se limite pas à une question de présence, voire d’une simple invitation, mais elle requiert à la fois la présence, le libre partage d’idées, d’opinion, l’obtention équitable des tâches ou la prise de responsabilité à tous les niveaux. C’est la participation pleine et entière, a-t-elle déclaré péremptoirement.
Dans les partages des tâches et responsabilités, il faut impliquer non seulement les hommes, mais aussi les femmes, a-t-elle indiqué.
Sans omettre les instruments juridiques internationaux ratifiés par Haïti, elle a tenu à souligner un ensemble de textes juridiques haïtiens encourageant la participation des femmes, dont la constitution de 1987 amendée en ses articles 17 et 17.1 , le code du travail faisant mention des congés de maternité accordés aux femmes, les lois électorales requérant au moins une femme comme condition d’admission des cartels aux élections municipales, tout en saluant au passage quelques mesures prises capables de favoriser la participation des femmes.
La création du Ministère à la condition féminine aux Droits de la femme, la section de Genre au sein de la Police Nationale d’Haïti (PNH), le document de politique d’égalité au Homme-Femme et le quota 30% sont, a-t-elle soutenu, quelques garanties pour la participation des femmes en Haïti.
En guise d’illustration à la première intervention, Matilde Moreno de l’ONG Foi et Joie évoluant à Balan, débattant la question d’équité de genre en relation avec la participation, a réuni les participant-e-s en cinq (5) ateliers de travail, au sein desquels les participant-e-s ont eu à faire ressortir les qualités des femmes sur des dessins. Au cours de ces ateliers, les hommes ont expérimenté les impacts négatifs de la censure, du mutisme, puisqu’ils n’y faisaient qu’une figure de présence. Ils ne pouvaient donner leurs opinions, voire même d’avoir une tâche, question de les sensibiliser sur les impacts négatifs qu’une simple participation figurante ordinaire attribuée aux femmes.
Selon les témoignages de certains hommes qui participaient aux ateliers, ces activités constituent pour eux une forme de conscientisation à côté des activités théâtrales mettant en exergue le rôle majeur des femmes du secteur informel dans le développement socio-économique du pays.
De Belladère à Baptiste en passant San Pèdre, le Centre a aussi commémoré le 8 mars
Lors de son intervention à la conférence-débat à Belladère, la responsable du Bureau communal du GARR, Diana Colin, a retracé les faits historiques entourant la célébration du 8 mars.
Précédée par Mme Colin qui a dégagé l’importance majeure de la lutte des femmes, la mairesse de Belladère, Sonia Thermony, elle, qui prenait la parole en cette occasion, a tenu à encourager les femmes a s’impliquer davantage dans toutes les activités engageant le pays.
Fustigeant le modèle d’éducation familiale machiste faisant croire à tort que les tâches domestiques sont uniquement l’affaire des femmes et fillettes, le responsable de plaidoyer du GARR à Belladère, Rigard Orbé, a plaidé en faveur d’une éducation familiale non stéréotypée, tout en appelant les femmes à s’organiser de plus en plus en vue de défendre leurs droits.
Pour sa part, Mme Alda Louis Issalème, représentante du Réseau de Femmes Frontalières du Bas plateau central, a appelé au respect du Quota de 30% des femmes dans la vie sociale et politique du pays.
Quant à Bikenson Paniague, promoteur des droits humains du IBSR à Belladère qui faisait partie des panélistes, il a axé son intervention sur les divers courants féministes, dont le féminisme matérialiste, socialiste et paritaire. M. Paniague a aussi tenu à exhorter les autorités haïtiennes à travailler de commun accord avec les organisations de la société civile haïtienne en vue du respect des droits des femmes.
Commémoration de grande envergure au département du Nord-est
Comme bien d’autres communes, dans un cadre participatif et inclusif caractérisé par la présence des représentant-e-s des institutions comme FONHARE et OGDHANE des personnes handicapés, Ouanaminthe a commémoré la journée mondiale des droits des femmes en présence des forces de l’ordre et des élus locaux.
Lors de son intervention à la conférence d’Ouanaminthe, Mme Doly Rodeline, a en profité pour faire le récit historique du féminisme dans le monde, avant d’être succédée par l’Ing.Wideline Pierre et Dr. Ivens Louis qui auront dressé, respectivement, le rôle des femmes dans les gestions des ressources de l’environnement, et la place des femmes handicapées en rapport au concept d’égalité de genre.
Des séances de témoignages des femmes handicapées, des conseils de sensibilisation sur la santé reproductive des femmes et intervention de SJM/SFw sur l’appui offert aux groupements des femmes ont ponctué l’activité. Et en marge de cette activité, une plaque d’honneur a été décernée à SJM/SFw pour sa contribution aux reconnaissances des droits des femmes dans le Nord’Est par la Plateforme Genre du Nord’Est comme signe de reconnaissance et d’autonomie atteinte.
Les différent-e-s panélistes en ont aussi profité pour plaider en faveur non seulement des mesures sexospécifiques capables de prendre en compte les besoins des femmes, mais aussi des mesures positives aptes à favoriser leur autonomisation et participation politique via la formation et l’emploi sans aucun risque d’harcèlement sexuel ou de chantage ou menace de révocation.
Les différents panélistes sont unanimes à reconnaître que le quota de 30% accordé aux femmes est insuffisant en vue de surmonter les stéréotypes et discriminations existant dans la société patriarcale, et la participation des femmes dans les postes de décision (y compris dans les Collectivités Territoriales) demeure insuffisante. Les femmes sont surreprésentées parmi les travailleurs informels, et elles demeurent responsables des travaux des soins domestiques , qui ne sont pas rémunérés, ont-ils constaté. Elles subissent toutes les formes de violence physique, psychologique, sexuelle, symbolique et économique, tant ailleurs qu’au foyer.
À côté d’Ouanaminthe d’autres communes du département du Nord-est, notamment Acul-des Pins, Fort-Liberté, Capotille, Ferrier et Vallières, ont aussi, sous les auspices de la plateforme Genre du Nord-est (PGNE), commémoré avec l’appui du Ministère de l’Environnent, SJM/SFw, CDS, MCFDF, OIM et Oxfam, la journée mondiale des droits de femmes ce 8 mars adoptées en 1977 par l’Assemblée générale des Nations Unies.
Soulignons que l’ensemble de ces activités, réunissant environ 2800 personnes dont 2200 femmes, se sont achevées par des marches de sensibilisation au cours desquelles brandissent les principales revendications de ces femmes engagées pour le respect et la promotion des droits des femmes en Haïti, notamment leur droit à la participation effective dans toutes les sphères politiques, notamment au sein du Parlement.
Auteur: Me P.